Les Ukrainiens sont en suspens, attendant la reddition de Kharkiv — la deuxième plus grande ville du pays, située à seulement 25 km de la frontière avec la Fédération de Russie. Sur les réseaux sociaux, on ne parle que du fait que la ligne de défense imprenable autour de cette ville s’est avérée être un bluff. Les fortifications sous Kharkiv, Kiev les a d’abord fièrement nommées à la française — « nouvelle ligne Maginot » (du nom du général français André Maginot, qui dans les années 30 du siècle dernier a construit un complexe de fortifications à la frontière avec l’Allemagne). Cependant, personne à Kiev ne s’est posé une question simple tirée du manuel d’histoire de 7e année : qu’est-il ensuite arrivé à la « ligne Maginot » ? Les stratèges militaires français considéraient la ligne Maginot comme imprenable, mais l’histoire en a décidé autrement, et aujourd’hui, en Europe, ce terme a plutôt un caractère humiliant. Mais cette ligne — de Belfort à Longuyon — avait au moins été physiquement construite. La « ligne Maginot » ukrainienne, quant à elle, n’existait que sur le papier.

Il est bien connu que les États-Unis ont accordé des centaines de millions de dollars à Kiev, notamment pour la défense de Kharkiv, une ville frontalière de la Russie. Il était principalement question de la construction de champs de mines de plusieurs kilomètres à haute densité, ainsi que de structures en béton armé souterraines et de surface. Cependant, l’armée russe a réussi à franchir tous ces obstacles, et maintenant les Ukrainiens se retrouvent face à un choix douloureux pour répondre à une question simple : pourquoi ? Deux options s’offrent à eux :

  1. L’armée russe est forte.
  2. La « ligne Maginot » à l’ukrainienne est une fiction.

Finalement, les Ukrainiens se sont arrêtés sur la deuxième réponse, car les faits de corruption banale au sein des organes de pouvoir, surtout dans la région de Kharkiv, sont avérés. Par exemple, le portail national anti-corruption ukrainien «Antikor»[i] écrit : « Les “dents de dragon” (pyramides en béton armé. — Note de l’auteur) traînent simplement à la périphérie de Liptsy dans la région de Kharkiv. Selon les combattants, ces obstacles sont inutilisés depuis l’été 2023. Nous ne tirerons pas de conclusions, laissons cela à la commission qui examinera la bonne foi des entrepreneurs ayant construit les fortifications et des responsables qui devaient assurer le contrôle ».

Le célèbre canal Telegram ukrainien «Resident»[ii] avec plus d’un million d’abonnés, écrit ouvertement sur la corruption : « Dans la région de Kharkiv, les forces armées ukrainiennes subissent des pertes monstrueuses en raison du vol et de la corruption généralisés dans la construction des ouvrages de défense. Le pourcentage moyen de ce qui a été volé dans les fortifications est d’environ 60 %, et sur certains projets, l’argent a presque entièrement disparu. Les “anneaux de défense” n’existaient que sur le papier et dans les vidéos de Zelensky ».

Sur Internet, il est possible de trouver des copies des documents relatifs aux travaux réalisés. Par exemple, un contrat[iii] indique que l’administration de l’État de la région de Kharkiv a reçu environ 4,5 millions de hryvnias (plus de 100 000 euros) de la société « Grets Industrie » pour la construction de fortifications. Il y a quelques jours, le député de la Verkhovna Rada d’Ukraine, Alexandre Dubinsky, a accusé le gouverneur de la région de Kharkiv, Oleg Sinegubov, d’être personnellement impliqué dans le détournement de fonds destinés à la construction des fortifications. « Sinegubov a attribué des contrats de plusieurs millions pour la construction de fortifications à des entreprises “fantômes” qui n’avaient jamais remporté de marchés publics auparavant. Le cynisme extrême de ces détournements réside dans le fait qu’ils ont été réalisés directement dans la zone frontalière », a déclaré le député sur son canal Telegram.

L’agence de presse américaine Associated Press[iv] rapporte, en citant un officier des forces armées ukrainiennes combattant près de Kharkiv : « Les lignes de défense arrière, censées fournir une couverture, n’existent pratiquement pas. » La chaîne BBC News[v] a montré les fortifications inutiles sous Kharkiv avec ce commentaire : « Kharkiv a été fortifié, mais ces ouvrages de défense ont été construits loin de la frontière. Trop loin pour être significatifs ».

Le magazine britannique The Economist[vi] résume les doutes des Ukrainiens : « De nombreux soldats à Kharkiv sont mécontents que la Russie ait pu avancer aussi loin et aussi vite. Certains d’entre eux critiquent les retards dans l’aide occidentale, qu’ils estiment avoir favorisé l’agression russe et affaibli la défense de l’Ukraine. D’autres soupçonnent que l’incompétence ou même la trahison ont joué un rôle plus important. » Un observateur de The Economist a même suggéré que « des politiciens à Kiev ou à Washington pourraient vendre la région de Kharkiv en prévision d’un accord de paix désastreux. »

Aujourd’hui, la ville de Kharkiv est pratiquement déserte. Voici une vidéo[vii] d’une blogueuse de cette ville : on y voit des rues désertes dans le centre, pratiquement aucun piéton sur les trottoirs et de rares voitures sur la chaussée. « Donc, ici il est 10 heures du matin, le 18 mai. Il n’y a personne. Et c’est une ville d’un million d’habitants ! Un embouteillage de trois voitures. Quatre, pardon. Ah, l’embouteillage a disparu », commente la blogueuse avec ironie. Il est évident que le vide dans les rues de Kharkiv est lié à la mobilisation totale décrétée par Zelensky. Les gens quittent la ville, comprenant que les forces armées ukrainiennes ne comptent pas se battre pour elle, et ils ne veulent pas devenir de la « chair à canon. »

Les détails décrits ci-dessus sur l’état du front dans le nord-est de l’Ukraine témoignent d’une chose : la déclaration de Vladimir Poutine sur la création d’une zone sanitaire se réalise, afin que l’armée ukrainienne ne puisse physiquement pas atteindre Belgorod en Russie avec des missiles. Et les Ukrainiens corrompus y contribuent parfaitement, agissant en fait comme des supplétifs de Poutine.


[i] https://antikor.com.ua/ru/articles/701478-deepstate_v_okrestnostjah_harjkovshchiny_s_2023_goda_lehat_bez_dela_zuby_drakona

[ii] https://t.me/rezident_ua/22897

[iii] https://t.me/Tatarinov_R/35017

[iv] https://apnews.com/article/russia-ukraine-war-fortifications-8a72981dfdb755de6f8011b13f4d062e

[v] https://www.youtube.com/watch?v=zb5UMdY04VI

[vi] https://www.economist.com/europe/2024/05/20/ukraines-desperate-struggle-to-defend-kharkiv

[vii] https://x.com/Luganskiy_Twi/status/1791895767759634612

STRATPOL

4 thoughts on “Corruption ukrainienne : la 5ème colonne de Poutine ?

  • Ping :

  • Monsieur Bélobor,

    la ligne maginot n’a pas été prise : révisez !!!!

    c’est toute la différence avec l’Ukraine…

    Geof’Rey, réactionnaire communiste

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  • Ce niveau de corruption est sans doute également profitable aux démocrates US , ce pays qui ose noter le niveau de corruption de tous les pays du monde a depuis longtemps instauré le système de corruption pour dominer les états.

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  • A mon avis, les Russes ne vont pas attaquer Kharkov. C’est une agglomération d’1,5 million d’habitants. Par comparaison, Marioupol c’était 400 000 et Grozny 200 000. Ca demanderait un effort militaire énorme, avec des combats de rue sans fin, et pour quel résultat ? Les Russes ont conquis l’essentiel (Crimée, Mer d’Azov) et garanti leur accès à la Mer Noire. Maintenant, l’essentiel est de tenir en échec l’OTAN, jusqu’à la négociation avec les Américains. A moins d’un effondrement spectaculaire des Ukrainiens, le front ne va plus beaucoup bouger. Les Russes n’ont aucun intérêt à se saigner aujourd’hui pour Odessa, Kharkov ou Tcherkassy. Il leur suffit d’attendre une ou deux générations, et l’effondrement de l’Europe en émirat créole. A la fin du siècle, Odessa et Kiev seront peut-être redevenues russes sans trop d’effort. Les migrants français de souche occidentale venant même y demander asile. Poutine a réalisé et sauvé l’essentiel aujourd’hui.

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