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Les termes secrets des négociations de 2022 entre l’Ukraine et la Russie

Faisant écho à l’interview de Vladimir Poutine par Tucker Carlson, dans laquelle il se disait ouvert à de nouvelles négociations de paix, le Wall Street Journal (WSJ) vient de publier une partie demeurée secrète des termes de l’accord de paix entre l’Ukraine et la Fédération de Russie, que Moscou et Kiev étaient à deux doigts de signer en avril 2022, mais que l’OTAN a refusé.

Boris Johnson était en effet intervenu à cette époque pour faire capoter ces accords et pousser Zelensky à continuer les combats quoi qu’il en coûte, en lui promettant le soutien inconditionnel de l’OTAN. La mise en scène du massacre de Boutcha avait alors servi de catalyseur pour pousser les pays européens à s’engager à soutenir économiquement et militairement l’Ukraine afin d’éviter sa capitulation.

Nous apprenons que les parties ont discuté, entre autres choses, des conditions suivantes :

  • L’Ukraine pouvait devenir membre de l’UE, mais pas rejoindre des alliances militaires telles que l’OTAN. Autrement dit, la neutralité du pays a été envisagée dans la perspective d’une adhésion à l’UE ;
  • De tous les territoires occupés, seule la Crimée resterait sous contrôle inconditionnel de la Russie. L’avenir des LDNR devait être personnellement discuté et négocié entre Zelensky et Poutine ultérieurement. Quant aux autres territoires repris par la Russie après le 24 février 2022, l’article du WSJ ne les mentionne pas, mais un certain nombre de personnes participant aux négociations avaient déclaré que Moscou avait accepté d’en retirer les troupes russes et de les rétrocéder à Kiev ;
  • Il devenait interdit d’envoyer des armes et des troupes étrangères en Ukraine (Occidentales ou Russes) ;
  • L’armée ukrainienne devait être réduite à une certaine taille : la Russie ne voulait pas plus de 85.000 militaires, 342 chars et 519 pièces d’artillerie. Et la portée des missiles est limitée à 40 km. L’Ukraine demandait d’augmenter cette limite à 250.000 militaires, 800 chars et 1.900 pièces d’artillerie. Les négociations étaient encore en cours ;
  • La langue russe devait être utilisée sur un pied d’égalité avec l’ukrainien dans la sphère officielle. Mais l’Ukraine n’était pas d’accord sur ce point ;
  • La Russie ne voulait pas que la CPI enquête sur les crimes de guerre en Ukraine. L’Ukraine n’était pas d’accord sur ce point ;
  • La Russie demandait la levée de toutes les sanctions mutuelles. Les négociations étaient encore en cours : l’Ukraine n’acceptait pas de lever toutes ses sanctions contre la Russie ;
  • La sécurité de l’Ukraine en vertu de ce traité devait être garantie par des puissances étrangères, parmi lesquelles figurent les États-Unis, la Grande-Bretagne, la Chine, la France et la Russie dans le document. Ces pays auraient la responsabilité de défendre l’Ukraine si le traité était violé. Mais tant que le traité restait en vigueur, les garants étaient tenus de « mettre fin aux traités et accords internationaux incompatibles avec la neutralité permanente de l’Ukraine », y compris toute promesse d’assistance militaire bilatérale. Les garanties de sécurité internationale ne s’appliqueraient pas à la Crimée et à Sébastopol puisque reconnues comme propriétés russes ;
  • La Russie voulait également ajouter la Biélorussie comme garant, et l’Ukraine – la Turquie ;
  • En cas d’attaque contre l’Ukraine, la Fédération de Russie a proposé que tous les États garants se mettent d’accord sur une réponse, mais Kiev s’y est opposée, car une telle condition « signifierait qu’une réponse commune est peu probable si la Russie elle-même devenait l’agresseur ». L’Ukraine, en cas d’attaque, souhaitait que son espace aérien soit fermé, obligeant les États garants à introduire une zone d’exclusion aérienne et à fournir des armes. La Fédération de Russie n’a pas accepté cette proposition.

Le WSJ commente que le document « semble être largement basé sur le traité de 1990 qui a créé une Allemagne unifiée moderne ».

Les négociations se sont poursuivies jusqu’en juin 2022, notamment en visiophonie. Le WSJ écrit qu’elles se sont arrêtées à l’initiative de l’Ukraine, qui a estimé pouvoir reprendre militairement le contrôle de ses frontières datant de la sécession avec la Russie en 1991 : « En fin de compte, aucun accord n’a pu être conclu. L’ampleur des crimes de guerre russes en Ukraine est devenue évidente, les succès militaires de l’Ukraine se sont améliorés et l’Occident a fourni des armes pour soutenir Kiev. »

Moscou répond simplement à cette publication que les négociations ont été interrompues par Kiev à la demande de Londres et que la situation ayant changé, elles ne peuvent plus servir de base à de nouvelles négociations.

Ces propositions auraient pu aboutir, mais il est évident aujourd’hui que l’Occident ne voulait pas de paix et a tout fait pour prolonger ce conflit.

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3 thoughts on “Les termes secrets des négociations de 2022 entre l’Ukraine et la Russie

  • Des conditions INCROYABLEMENT AVANTAGEUSES pour l’Ukraine : hormis la Crimée et Sébastopol, un RECUL COMPLET de la Russie non seulement en Novorossya (le littoral de la mer d’Azov) mais AUSSI du Donbass si manifestement non seulement russophone mais RUSSE … soit … notamment … l’abandon de … MARIOUPOL!!! Des allusions aux “crimes de guerre russes” mais AUCUN s’agissant des crimes de guerre et contre l’Humanité commis par le Régime NAIZ de Kiev depuis 2014 (Odessa … Marioupol …) !!! Et malgré tout, Zelensky a REFUSE de les souscrire à l’incitation, aux pressions, aux “promesses” (et sans doute aux MENACES !) de cette SALOPERIE de RU !!!

    Il est désormais CLAIREMENT PROUVE que le BUT de l’Occident (Etats-Unis, RU et OTAN en tête) est bien la DESTRUCTION de la Russie par la GUERRE !!! Une GUERRE aussi TOTALE que celle entreprise par l’Allemagne NAZIE !!! C’est donc, dès lors, une lutte à MORT entre la Russie et l’Occident qui s’est “converti” au NEO NAZISME !!!

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  • très intéressant, merci ! Il semble évident que l’essentiel pour la Russie est la Crimée (accès aux mers chaudes) et la non-constitution d’une “anti-Russie” à ses portes (tant au plan géographique qu’au plan culturel et symbolique). Mais, en effet, au-delà de la stabilisation de ses marches sud-ouest, l’avenir de la Russie ne dépend pas existentiellement de savoir quelle langue on va parler en banlieue de Dniepropetrovsk. Il était donc parfaitement possible de négocier avec Moscou, sur des bases réalistes. Finalement, tout cela n’est-il pas une redite de la guerre de Crimée ?

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  • Bonjour. Pourriez-vous me dire pour qu’elle raison il n’est plus possible d’envoyer des discussions sur Stratpol telegram? Il est inscrit actuellement que ce groupe de discussion a été fermé provisoirement en raison de contenus pornographiques? Je vous remercie pour votre retour. Cordialement. APrest

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