La Prise de contrôle éclair de la Syrie par une coalition des oppositions au régime de Bachar El Assad constitue incontestablement une belle victoire pour le camp des néocons israélo-US-OTAN. Elle a été rendue possible par la conjonction de plusieurs facteurs :

La Syrie était très affaiblie par 13 années de guerre civile et de sanctions économiques qui avaient gravement affecté les populations civiles, prêtes à se tourner vers n’importe quelle solution nouvelle pouvant apporter un espoir, même incertain. Le lecteur notera que cet affaiblissement économique de l’État syrien était aussi très largement lié à l’occupation du territoire de la Syrie par l’Armée des États-Unis sous le prétexte mensonger de combattre le terrorisme. Les États-Unis qui n’avaient pas été invités par le gouvernement légal du pays, seul reconnu à l’ONU, étaient donc en contravention flagrante avec le droit international, en occupant illégalement un pays souverain.

En fait, ce corps expéditionnaire US n’a jamais vraiment combattu le terrorisme, bien au contraire. Il s’est contenté d’armer, d’entraîner, d’instrumentaliser les terroristes dans le seul but de combattre et de renverser Bachar El Assad. Ils ont largement contribué à répandre le «chaos constructif ou créateur » cher à Condoleeza Rice et à Georges Friedman.

Par ailleurs, les Forces Armées US établies en Syrie se sont organisées pour piller les ressources pétrolières du pays et pour détruire ou polluer les récoltes par des bombardements. Le but à atteindre étant d’appauvrir le pays et d’interdire son autosubsistance pour amener les populations civiles désespérées à se révolter contre la gouvernance de Bachar El Assad. C’est ce qui a fini par arriver ces jours derniers.

  • Dans la charge éclair menée contre la Syrie, l’opposition au régime de Bachar el Assad était largement soutenue, financée, équipée, armée, entraînée et même encadrée et renseignée par la coalition israélo-US-OTAN, les premiers rôles étant tenus par Israël et son proxy US, ainsi que par une Turquie dont le chef d’État était personnellement intéressé au succès de cette opération.
  • Les principaux soutiens du régime de Bachar El Assad avaient d’autres priorités qui rendaient leur intervention difficile. Le Hezbollah était engagé contre les forces israéliennes pour assurer la défense du territoire libanais et pouvait difficilement intervenir sur un deuxième front en Syrie. La Russie ne pouvait divertir une partie de ses forces du théâtre ukrainien, alors même qu’elle souhaitait y intensifier son effort pour conquérir un maximum de territoires avant une éventuelle ouverture de négociation. L’Iran ne souhaitait ni disperser, ni user ses forces et risquer d’en manquer lors d’une confrontation majeure qui pourrait survenir demain contre une coalition israélo-US.

A qui profite la situation ?

Les grands perdants de cette belle opération israélo-US-OTAN sont bien sûr, d’abord, les palestiniens qui voient certains de leurs principaux soutiens affaiblis et surtout qui ont vu les médias détourner leur attention vers la Syrie, ce qui permet au génocide dont ils sont les victimes de se poursuivre dans un silence médiatique assourdissant.

Le Hezbollah figure lui aussi parmi les perdants puisqu’il se voit coupé de sa base arrière et de ses soutiens iraniens. Plus généralement, l’axe de la résistance du croissant chiite qui allait de Téhéran à Beyrouth en passant par Bagdad et Damas est incontestablement affaibli, car coupé en deux et l’Iran a montré ses limites en choisissant, sans doute avec raison, de ne pas intervenir.

Enfin, l’image de la Russie ne sort pas forcément grandie, aux yeux de la majorité planétaire, en laissant tomber un allié de longue date. En outre, elle risque de perdre ses deux bases de Tartous et de Hmeimim, ce qui constituera(it), pour elle, un revers stratégique majeur.

La grande gagnante est incontestablement la gouvernance génocidaire d’Israël qui a posé les bases des futures étapes menant au «Grand Israël» et réussi à divertir les médias de l’opération de nettoyage ethnique en cours en Palestine. Ne doutons pas que des annexions nouvelles de terres syriennes par Israël seront réalisées dans les prochains mois, notamment dans le Golan syrien, sous le prétexte prévisible de ne pas voir de méchants islamistes s’installer à ses frontières.

J’avais écrit tout cela de manière très précise en avril 2017. Ce qui est arrivé aujourd’hui me donne raison, en tout cas sur les objectifs à long terme d’Israël.

La Turquie d’Erdogan sort également gagnante de cette opération, même si son rôle dans cette opération n’aura probablement pas été très apprécié par Moscou et Téhéran.

Ce renversement du régime de Bachar El Assad n’est donc, en aucun cas, le résultat des actions menées par une prétendue coalition des oppositions, mais c’est, sans l’ombre d’un doute, le résultat de l’action, en coulisse, d’une coalition de quatre États: Israël (Mossad), meneur de Jeu; ses proxies US (CIA) UK (MI6) et la Turquie. Sans le soutien coordonné de ces quatre États, le régime laïc Syrien serait toujours en place. Il est regrettable que nos médias nous servent un tout autre narratif. Pour mémoire revoir cette interview de Roland Dumas.

Pour les journalistes naïfs, ou qui font semblant de l’être, revoir ce témoignage du général US Wesley Clark. Et pour ceux qui veulent plus de détails, voir cette autre conférence. Enfin, cette photo extraite d’une vidéo prise en Syrie, il y a 48h, en dit long:

Si certains de mes lecteurs n’avaient toujours pas compris à ce stade, je ne peux plus rien pour eux.

Et maintenant ?

Il est peu probable que les occidentaux, après l’avoir instrumentalisé pour renverser le régime syrien, acceptent que Hayat Tahrir al-Cham (HTS), classé terroriste par l’ONU, les USA, l’UE et la Russie puisse exercer le pouvoir bien longtemps en Syrie, aux frontières même d’Israël. Les Forces israéliennes ont déjà pénétré en Syrie et occupent une large part du Golan. Il paraît peu probable qu’elles s’en retirent un jour. Les israéliens ont déjà effectué 250 frappes sur la Syrie depuis la prise de pouvoir par HTS. Les chars israéliens sont désormais à moins de 20 kilomètres de Damas.

Il est encore trop tôt pour donner des pronostics sur l’avenir de la Syrie. La seule conviction qui est la mienne, c’est qu’Israël cherchera, comme toujours, à grignoter toujours plus de terre syrienne sur le Golan et ailleurs au prétexte que l’installation d’Islamistes à ses frontières constitue une menace grave pour sa sécurité nationale. Israël a déjà d’ailleurs commencé à élargir sa «zone tampon» sur le Golan …. La violence au Proche Orient est donc loin d’être éteinte.

La finalisation du projet à long terme «Eretz Israël» qui a toujours prévalu depuis la création de l’État devrait constituer un fil directeur pour tous ceux qui réfléchissent aux équilibre géopolitique de la région. HTS restera probablement beaucoup moins longtemps au pouvoir que la dynastie Assad. Israël saura se débarrasser d’HTS, le moment venu, après l’avoir utilisé comme proxy.

Je suis intervenu à plusieurs reprises sur des chaînes alternatives sur ce sujet syrien : au Canada et Sur Géopolitique Profonde.

 

Dominique Delawarde
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One thought on “Qui a pris le contrôle de la Syrie, et comment ?

  • “Les peuples non mélangés appartiennent aux idées périmées du XIXème siècle (ndt : souchiennes). Pour passer au XXIème siècle (ndt : otanien mondialiste), il ne doit plus exister que des états multi-ethniques”
    .
    Wesley Clark
    .
    Pour que le Dollar de Speculator Nowhere règne, multi-niquer les troupeaux des gueux souchiens pour les diviser et les affaiblir, aurait ajouté Soros

    Répondre

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