31 mai 1916… Britannia, la fille préférée de Neptune…
Aux derniers jours de mai 1916, en mer du Nord un choc titanesque avait eu lieu dans le Skagerrak, entre les croiseurs cuirassés de la Hochseeflotte[1] et leurs homologues de la Grand[2] Fleet. Les Britanniques avaient concédé de lourdes pertes puis les puissants bâtiments de l’amiral Scheer s’étaient échappés pour rentrer presque sans encombre dans leur base de Wilhelmshaven à l’abri des barrages de mines de la baie allemande.
Pourtant, malgré cette sortie spectaculaire et la violence des coups assenés, la mer n’en restait pas moins salée. Cette unique bataille navale d’importance[3] de la guerre n’avait en effet aucunement permis à la marine allemande de desserrer l’étau du blocus qui jour après jour étouffait inexorablement l’économie du Reich. En pleine bataille de Verdun, quelque part entre la Norvège et le Danemark, l’Angleterre avait sans doute frôlé la catastrophe mais elle restait sur les vagues la fille préférée de Neptune, maitresse incontestée du grand large.
VERDUN ! En décembre 1916, après dix mois de fracas et d’enfer, la poussière des combats et le silence retombaient enfin sur le champ de bataille de Verdun. Avec les combats de la Somme, plus de 500 000 soldats français, britanniques et allemands avaient péri. Les deux camps étaient exsangues. Cependant, au prix d’un effroyable sacrifice humain, la France et son armée de paysans arc-boutés à la terre avait tenu.
Décembre 1916 : « La poussière des combats et le silence venaient de retomber sur le champ de bataille de Verdun… »
12 décembre 1916, ultime offre de paix du Kaiser avant la guerre sous-marine…
1916 s’achevait donc et le monde entrait dans sa troisième année de guerre. Pour l’état-major allemand, la situation militaire apparaissait sans issue. A l’ouest, l’effondrement attendu de l’armée française destiné à provoquer une rupture de l’alliance franco anglaise ne s’était pas produit. Malgré l’épuisement et les morts, désormais le carburant, les munitions, la nourriture et tout le matériel nécessaire à la conduite d’une guerre moderne affluaient régulièrement, acheminés par l’océan Atlantique des usines du Nouveau Monde directement jusqu’aux poilus dans les tranchées du front occidental.
Pour le commandement suprême allemand, l’heure était grave car le temps jouait désormais nettement contre les empires centraux. La guerre sous-marine, en sommeil depuis 16 mois, apparut comme le dernier moyen de gagner la guerre. Le Maréchal Hindenburg, chef des armées impériales, demanda donc sa reprise sans restriction. Après la triste affaire du paquebot Lusitania en mai 1915 où avait péri une centaine de citoyens américains, le chancelier Bethmann-Hollweg s’était farouchement opposé à l’amiral Tirpitz sur ce sujet et restait convaincu que la guerre sous-marine serait un choix désastreux qui entrainerait l’entrée en guerre immédiate des Etats-Unis et la défaite inéluctable du Reich. Les experts de la marine impériale étaient alors entrés dans la partie en affirmant qu’un engagement des submersibles à partir du 1er février 1917 mettrait l’Angleterre hors de combat le 1er août au plus tard, c’est-à -dire bien avant l’arrivée des premiers soldats américains. Avant de prendre cette lourde décision, le Kaiser adressa le 12 décembre 1916 une offre de paix aux puissances en demandant la médiation des Etats-Unis.
La vertueuse Amérique du président Wilson
Le très pacifiste et très isolationniste président Woodrow Wilson, qui venait d’être réélu en novembre 1916 à une forte majorité grâce aux voix des Américains d’origine allemande sur un programme de neutralité, décida d’agir une dernière fois en faveur de la paix. En réponse au Kaiser, il invita le 21 décembre 1916 les deux parties à faire connaître leurs conditions. Cette tentative fut reçue à Paris et à Londres comme un aveu de faiblesse. L’Allemagne tentait donc d’obtenir par ruse ce qu’elle ne pouvait plus obtenir par force… De part et d’autre, l’aveuglement et la haine étaient effroyables. Depuis le début des hostilités, la vertueuse Amérique se posait en championne de la concorde et de la paix et menait une politique d’apparente neutralité. Blocus anglais et guerre sous-marine allemande lui causaient un égal préjudice commercial. La balance n’était pourtant pas égale. La Grande Bretagne pouvait sans difficulté opposer une sourde oreille aux protestations américaines contre les restrictions imposées au commerce des neutres alors que l’Allemagne impuissante ne pouvait que constater amèrement la livraison par les Etats-Unis aux alliés de fournitures de guerre. Pour aplanir les casus belli, le président américain qui offrait sa médiation aux deux belligérants avait dépêché auprès des gouvernements de Londres et de Berlin son émissaire personnel, le colonel House. Pour ses affaires sérieuses, l’Amérique blanche anglo-saxonne et protestante ne faisait pas grand cas de Paris et encore moins de Saint Pétersbourg. Le Président Wilson considérait avec hostilité l’idée d’une alliance avec la Russie autocratique. Il n’était donc pas question pour la libre Amérique de rejoindre la Triple Entente. L’Angleterre ne perdait cependant pas tout espoir d’associer très prochainement l’Amérique à la guerre. Au début de 1917, pour donner plus ample matière à réflexion au gouvernement américain, Londres laissa complaisamment se répandre dans les milieux capitalistes de la bourse de New-York la rumeur alarmante d’un effondrement financier de la City imminent et total. L’Amérique se trouvait donc placé devant un pénible dilemme : ou reconnaitre l’insolvabilité de son principal débiteur et être ruiné à son tour ou entrer résolument dans la guerre !
Révolution russe et croisade américaine…
Dès qu’il apparut que son offre de paix était rejetée par les alliés, l’Allemagne annonça aux neutres le 2 février 1917 qu’elle lâchait désormais la bride à ses sous-marins contre tout trafic maritime dans les eaux bordières de l’Angleterre, de la France et de l’Italie. Le 4 février, entre Washington et Berlin, le dialogue diplomatique était rompu.
Mais, entre la rupture et la déclaration de guerre, il allait encore s’écouler deux mois pendant lesquels le centre de gravité des évènements politiques du monde se déplaça vers la Russie. Le 10 mars, emporté par une révolution, l’Empereur Nicolas II abdiquait. L’effondrement du colosse russe avait commencé. Pour l’Amérique puritaine, la Russie, par une grâce soudaine, rejoignait le camp fréquentable des nations démocratiques. Pour Wilson la dernière restriction morale à l’engagement venait de tomber. A Saint Pétersbourg, le gouvernement provisoire de Kérenski poursuivait encore la guerre aux côtés des alliés occidentaux. Cependant, dans cette surenchère du malheur, l’Allemagne gardait encore dans sa manche un coup à jouer : Lénine !
Pendant ce temps à Vienne, le jeune empereur d’Autriche Charles 1er de Habsbourg, lié à l’Allemagne par des traités dont il voulait se défaire, redoutait les conséquences d’un prolongement du conflit et se montrait disposé à une paix séparée avec la France. Il était entré en conversation secrètement au mois de mars en Suisse avec des émissaires du Président Poincaré. Pour mettre un terme au conflit, le souverain autrichien cherchait une solution diplomatique raisonnable mais d’un autre temps. La France à laquelle il s’adressait n’existait plus dans les nouvelles relations internationales et lui opposa malheureusement une fin de non recevoir. Parmi les quatorze points du plan Wilson qui allait engager l’Amérique pour la première fois de son Histoire dans les affaires du monde, le premier exigeait la fin de la diplomatie secrète et le dixième proclamait l’autonomie des peuples d’Autriche-Hongrie… Le maintien d’une vieille dynastie catholique au centre de l’Europe n’était évidemment pas prévu. Au contraire, entre une paix raisonnable et négociée avec l’Autriche ou la poursuite de la guerre totale avec l’Amérique jusqu’à la capitulation sans condition de l’adversaire, les gouvernants de la troisième république qui n’avaient ni la volonté ni la force de s’opposer à l’ordre serré des marchands d’outre-Atlantique avaient choisi… Dans cette lutte implacable pour la puissance, le sort de la double monarchie austro-hongroise et de l’Europe était irrémédiablement scellé.
Finalement, c’est l’Amirauté britannique qui mit fin au suspense en publiant un document qu’elle tenait en réserve, un télégramme secret du ministre des Affaires Etrangères allemand, Zimmermann, révélant une intention de créer des complications à la frontière du Mexique et des États-Unis. L’effet sur l’opinion publique fut immédiat ! Le 6 avril 1917, dans un enthousiasme indescriptible, le président Wilson devant le Congrès des Etats-Unis lançait sa croisade en Europe au nom du Droit, pour la démocratie, contre les gouvernements autocratiques et votait la guerre contre l’Allemagne.
[1] La flotte de haute mer allemande de la première guerre mondiale basée à Wilhelmshaven.
[2] La Home Fleet traditionnellement chargée de défendre les eaux territoriales britanniques avait été renommée Grand Fleet le 4 août 1914, lors de l’entrée en guerre de la Grande Bretagne.
[3] Bataille du Jutland 31 mai 1916
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Ayant fait torpiller les négociations secrètes engagées par l’empereur d’Autriche, le pape Benoît XV et les princes de Bourbon-Parme (sa double haine de la monarchie et du catholicisme) et liquidé Caillaux, Clemenceau, ayant empêché une Paix de compromis, porte une TERRIBLE responsabilité devant l’Histoire … Mesurons qu’alors, il n’y avait pas encore eu de Révolution russe, NI d’intervention américaine, NI de destruction de l’empire austro-hongrois … Redevenu Président du Conseil, il imprimera, dans une situation désespérée, une politique jusqu’auboutiste (« Je fais la guerre » !) déterminant de par le traité de Versailles, l’auto destruction cataclysmique européenne de la Seconde guerre mondiale …
Qu’en adviendra-t-il dans l’immédiat ? Se refusant à poursuivre le carnage généré par l’autocratie irresponsable des militaires (Joffre le tout premier !) jusqu’à Berlin (lors que Franchet d’Esperey avançait vers le Danube avec l’armée d’Orient et qu’une offensive était prévue vers le Rhin le 13 novembre 1918), il cède devant l’intransigeance britannique et américaine interdisant l’annexion de la rive gauche du Rhin, sur l’assurance de « promesses » d’assistance en cas de nouvelle agression allemande qui se révéleront caduques dès le rejet par le Sénat américain du traité de Versailles … Plus grave encore (et lourd de conséquences pour l’Avenir !), il porte atteinte à l’hégémonie diplomatique de la langue française depuis le traité de Rastadt (1714) en acceptant que soit accordé un statut égal à l’anglais comme langue de travail et langue de rédaction du traité… lors que l’armée française, ayant consenti et assumé la plus grande part de l’effort, des souffrances et des destructions de la guerre, a maintes fois sauvé les Britanniques de l’effondrement et armé, conseillé, entraîné et assisté une armée américaine, engagée très tardivement sur le théâtre même du conflit. Il a gagné la guerre … il perdra la Paix …
« On me blâme amèrement de n’avoir pas voulu donner une frontière stratégique à notre pays. Je ne pouvais le faire sans rompre l’alliance. » … « L’Angleterre est la désillusion de ma vie » … Ne connaissait-il donc pas l’Histoire de France … en le fait que, depuis le XIIème siècle, l’Angleterre s’est révélée être l’ENNEMIE de la France, lui suscitant “dans son dos” en le monde germanique, l’autre “Ennemie héréditaire” ?!!!
Il a rendu l’Alsace-Lorraine à la France (c’est le MOINS qu’il pouvait exiger !) … obtenu mandat pour 15 ans sur les mines de la Sarre (comment le lui refuser, le Nord et l’Est de la France ayant été saccagés de fond en comble par les Allemands !) … le Maroc (d’où sortira la guerre du Rif) … En revanche, il n’acquiert qu’une mauvaise frontière : celle de 1815 ayant favorisé les invasions. C’est que, outre les Américains (« associés » dans la guerre et non pas « alliés »), les Anglais (ayant obtenu pleine satisfaction, à commencer par la livraison de la flotte de guerre allemande – qu’elle se soit sabordée à Scapa Flow n’y change rien – !) entendent empêcher la France de « prendre l’Allemagne à la gorge » en annexant la Rhénanie catholique (qui s’était déclarée autonome le 1er février 1919 et mise sous la protection du général Mangin) de manière à la séparer définitivement de la Prusse protestante.
« La défaite de Sedan en 1870 avait été effacée, pas Waterloo. » (Eric Zemmour – « Destin Français »)
Et que dire des compensations financières, considérées comme « scandaleuses » par les Allemands et qui seront sans cesse revues à la « baisse » … en dépit de l’état dans lequel les Allemands avaient laissé la France après l’avoir pillée. Les Anglais, par la bouche de Keynes, prirent la défense de l’Allemagne et fustigèrent la « paix carthaginoise » … « oublieux » de celle que Bismarck n’avait pas craint d’imposer en 1871 sans qu’alors aucun économiste britannique n’ait alors pris la défense de la France !!! Des cent trente-deux milliards de marks-or initiaux, les plans Dawes (1924) et Young (1929), par delà les attaques étatsuno-britanniques contre la monnaie française, allégèrent le « fardeau » allemand … suspendu en 1929 et arrêté définitivement en 1931 par le moratoire Hoover et la conférence de Lausanne en 1932 … Entretemps, Clemenceau, désabusé, était mort en 1929. Au final, l’Allemagne n’aura déboursé que vingt milliards lors que la France devra honorer la dette colossale qu’elle avait à l’égard des Etats-Unis … qui, JAMAIS, n’auront remboursé la France pour l’aide qu’elle leur avait apportée lors de la guerre d’Indépendance … dette colossale d’où sont sortis à la fois la Crise des Finances des années “1780” ET la FUNESTE Révolution française !!!
Bonjour,
Vous n’avez pas mis “Jean de Joinville” dans les mots clés.
Conséquence cette article n’apparait pas dans la liste lié au mot clé “Jean de Joinville”.
“Le Président Wilson considérait avec hostilité l’idée d’une alliance avec la Russie autocratique.”
Russie autocratique qui avait autrefois sauvé les Etats-Unis.
Le Président Wilson n’était qu’une marionette contrôlée par le colonel House. De qui House prenait ses ordres? La réponse est dans la question.
Ainsi, Wilson mis en place le Système de Réserve Fédérale nécessaire au financement de la première guerre mondiale en 1913.
“Londres laissa complaisamment se répandre dans les milieux capitalistes de la bourse de New-York la rumeur alarmante d’un effondrement financier de la City imminent et total. L’Amérique se trouvait donc placé devant un pénible dilemme : ou reconnaître l’insolvabilité de son principal débiteur et être ruiné à son tour ou entrer résolument dans la guerre !”
Toutes les guerres sont des guerres de banquiers.
“Pour Wilson la dernière restriction morale à l’engagement venait de tomber.”
Bizarrement ou pas, Trotsky était un grand ami des banquiers de Wall street.
Ceux qui ne comprennent pas que la première guerre mondiale avait pour but de détruire les monarchies chrétiennes, ne comprennent rien à l’histoire et aux motivations de ses acteurs.
Est-ce que la France a poussé la Russie à la guerre pour récupérer l’Alsace et la Lorraine? Oui, sûrement.
Est-ce que le Royaume Britannique s’inquiétait du développement de la puissance Allemande et voulait provoquer une guerre continentale? Oui, sûrement.
Les pions ont beau être en place ce sont les joueurs qui les déplacent.
“Finalement, c’est l’Amirauté britannique qui mit fin au suspense en publiant un document qu’elle tenait en réserve”
Bah… tout ça c’est quand l’Europe faisait peur… maintenant c’est juste un chiotte africain avec dame pipi Moussa qui offre, à qui chie prestement sur nos lois, le papier cul OQTF pour se torcher avec… et dame pipi Sissy des Caraïbes, comme l’envahisseur reste à chier sur souchien, le papier cul d’identité boobalandaise…
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Quand le peuple dans sa branlette ne se défend plus, la caste, n’étant plus menacée, aiguillonnée, tombe facilement en décomposition… elle s’appelle alors la crasse.
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“Croyant à la décadence, je ne pouvais croire à autre chose qu’au fascisme qui est preuve de la décadence parce que résistance consciente à la décadence, avec les moyens déterminés par cette décadence même.”
Drieu La Rochelle