Le présent document est une tentative d’interprétation d’évènements concernant la Russie, au regard des informations disponibles. Il ne se veut ni une prophétie, ni une exégèse péremptoire de vérités autoproclamées. Toutefois, comme le résume l’excellent site zebrastationpolaire.over-blog.com, il peut être intéressant de s’ouvrir à des analyses « présentant un point de vue alternatif, en opposition avec les prétendues ” analyses ” syndiquées des ” medias libres ” des ” democrassies occidentales ” ».

Pour les Français (et probablement pour eux seuls) le voyage du président Macron en Asie centrale, interroge : S’agit-il d’une tentative de retrouver l’influence perdue en Afrique et au Liban[1], de consoler l’égo blessé de Jupiter voué aux gémonies dans son propre pays ? Ou bien, en marge de sa disparition des écrans du Kremlin, d’une insertion dans le Grand jeu US visant à créer des fronts secondaires contre la Russie ?

Le recours aux stratégies périphériques

Comme l’Allemagne, et peut-être même encore davantage, la Troisième Rome, pont eurasiatique entre l’Orient et l’Occident, connait la hantise du second front. De leur côté, les stratèges Nordaméricains ont intégré et perpétuent la vision géopolitique des cercles définie par Mc Kinder et Spykman[2]. Malgré l’injection de moyens militaires comme les chasseurs F16, les vieux Léopard 1 et surtout des missiles (ATACMS, SCALP/Storm Shadow, Neptune, M39A1 modernisés sur HIMARS, TAURUS (?) Trembita indigène, Totchka, S 200 et Grom convertis…) qui portent le rayon de nuisance de Kiev à plus de 200, voire 300 Km en deçà des lignes (c’est-à-dire quasiment toute le Crimée), conjugués à l’enrôlement forcé d’une part croissante de la population, il ne semble pas que le front soit destiné à des changements rapides.

La Fédération de Russie mène en réalité une guerre « à l’économie »[3], qui lui permet de tester ses matériels (Missiles hypersoniques, Kindjal, Onyx, hélicoptères Alligator Ka 50[4], bombes planantes guidées FAB, Mig 31[5], systèmes antisatellites, générateur d’impulsion électromagnétique sans explosion nucléaire Alabuga[6], pléthore de drones modernisés, avion AWACS A-50[7], obusiers Koalitsya et …) et de faire évoluer ses doctrines, tout en relançant son complexe militaro-industriel[8] et en ménageant ses effectifs, probablement en vue de préparer (à tout le moins d’être en état d’assumer) la confrontation directe avec l’OTAN[9]. Les USA tentent pour leur part de conserver des moyens offrant une masse critique suffisante pour s’opposer à la République Populaire de Chine.[10] Il est donc clairement perceptible que la stratégie US/OTAnienne consiste à tenter de figer le front ukrainien [11] tout en multipliant les initiatives de contournement[12].

Le front Nord

(NB la notion de « front » est ici conceptuelle et ne reflète pas avec exactitude la géographie)

  • Finlande et Suède[13], par leur entrée dans l’OTAN, verrouillent le front Nord. Ces deux nations disposent de capacités techniques et industrielles non négligeables en matière d’armement[14] et d’armées réduites mais bien équipées et entrainées[15]. Ces forces sont cependant surtout aptes à une posture défensive et ne constituent pas réellement des menaces pour la Russie. L’intégration dans l’OTAN ne changera guère une situation de coopération poussée depuis des décennies, et qui s’est amplifiée en Scandinavie depuis 2017[16]. Les vrais problématiques sont 1) que la Baltique devient un lac Otanien, ce qui aura des conséquences lors du futur dégagement des routes maritimes arctiques, consécutif au réchauffement, et que 2) des bases US vont être installées à la frontière de la Russie, bien que théoriquement des armes nucléaires ne devraient pas y être déployées.
  • Les pays baltes (Lettonie et Estonie, plus que Lituanie) sont entrés dans une russophobie active qui se traduit par des pressions accrues sur les citoyens d’origine/d’expression russe (interdiction de la langue russe, suppression des droits civiques, suppression des prestations sociales et médicales qui touchent une population majoritairement âgée, interdictions culturelles, confiscations…). La situation n’est pas sans évoquer celle des Pieds-noirs français lors de l’indépendance de l’Algérie. Or, l’opération spéciale a été déclenchée à la fois parce que l’OTAN menaçait de détacher l’Ukraine du monde slave et à cause d’actions assez comparables menées par Kiev depuis 2014 à l’encontre des russophones du Donbass.
  • La Pologne a manifesté en septembre ses réticences vis-à-vis des exportations de produits agricoles ukrainiens, faisant apparaître que sa position est davantage justifiée par une haine de la Russie que par l’amour des Ukrainiens bandéristes au pouvoir à Kiev, dont on ne peut ignorer qu’ils ont historiquement commencé à exister par un terrorisme anti-polonais. Le projet de Międzymorze (ou intermarum) pilsudskien, qui repose sur la nostalgie de l’hégémonie polono-lithuanienne et qui a connu un embryon de réalisation en 2016 avec la communauté des trois mers, se heurtera probablement à l’avancée territoriale de la Russie, y compris à Odessa. Un retour de l’Ukraine occidentale autour de Lvov dans le giron polonais sous une forme ou une autre[17] (déploiement de force d’interposition, référendum, accord bilatéral reprenant et élargissant celui de 2014…) est une hypothèse envisageable. Varsovie continue à acquérir des matériels militaires de manière massive (chars US, coréens, avions US, artillerie coréenne et israélienne… payés avec des fonds émanant de l’UE) avec pour ambition d’aligner la première armée européenne et de supplanter Berlin dans le rôle de premier vassal des USA à l’Ouest du continent[18]. La question se pose de déterminer si un pays de 40 millions d’habitants avec une économie moyenne et perfusée par l’UE, pourra soutenir dans la durée une telle force militaire. Le potentiel industriel et technologique obtenu ne suffira pas à rivaliser avec celui de Moscou, dans un contexte de guerre de haute intensité, de toutes façons. Néanmoins, quel que soit le résultat des élections législatives polonaises, il est quasi certain que la position du pays ne changera pas drastiquement à l’égard de Moscou[19]. Le point d’inquiétude concerne Kaliningrad ; des armements stratégiques russes y ont été déployés. La situation de l’enclave russe et les postures de ses voisins baltes et polonais créent un risque de dérive, éventuellement nucléaire puisque la doctrine, rappelée par le président Poutine qui a précisé le 5 octobre qu’il ne voyait pas d’intérêt à en abaisser le seuil d’application, prévoit que ces armements peuvent et ne doivent être employés que pour défendre le territoire ou l’existence de l’Etat russe[20].
  • La Biélorussie, qui s’est avéré un allié solide lors de la crise Wagner, continue à étendre sa coopération avec Moscou ; le 1er novembre un entretien Poutine/Loukachenko a préparé la prochaine réunion du conseil de sécurité collective de l’Organisation du Traité de sécurité collective et confirmant l’alliance stratégique entre les deux Etats.

Le front Centre

  • L’Allemagne commence à ressentir les effets de la dégradation économique liée aux coûts de l’énergie et (paradoxalement) aux sanctions. Toutefois, la soumission à l’hégémon étatsunien demeure[21], comme en témoigne la (non)gestion de l’enquête sur la destruction de Nord Stream 1 et la détérioration de Nord Stream 2, dont l’Allemagne était pourtant co-financier et victime principale. La sujétion allemande, qui lui avait assuré une primauté économique puis politique au sein de l’UE, au détriment de la France, semble ne plus jouer à plein. Jadis bénéficiant d’un régime social privilégié et sans héritage colonial -ou presque- la RFA avait pu surmonter la vague terroriste et contestatrice des années 70, puis les coûts de la réunification (grâce à une réorientation favorable de l’Europe) ; le pays apparaît désormais tout aussi incapable que la France, la Belgique, le Royaume-Uni, pour gérer sa population allogène et les troubles grandissants à l’ordre social. La volonté proclamée de redonner à une Bundeswehr en déshérence son lustre, par l’achat massif de matériels modernes se heurtera à la situation démographique allemande qui condamnerait le pays à armer ses unités avec des personnels Turcs si les effectifs étaient réellement gonflés. En tous cas, malgré un discours Pro OTAN et des fournitures limitées de moyens à Kiev, la politique allemande traduit ces hésitations et sa situation aporétique : Berlin apparaît incapable de se couper de Washington qui a assuré sa sécurité militaire depuis 1945[22], mais conscient que le conflit a abouti à ruiner toute perspective de collaboration économique fructueuse avec Moscou, ce découplage se poursuivant en déclassement de l’industrie germanique frappée de plein fouet par les diktats étatsuniens qui réduisent les débouchés et augmentent les couts. Faute de moyens, il parait improbable que la politique allemande évolue fondamentalement à court ou moyen termes, notamment en ce qui concerne une « reprise de relais » en Ukraine, en cas de désengagement US.[23]
  • La France est arrivée au bout de ses capacité matérielles[24], ce que le ministre des Armées Lecornu a officialisé en affirmant la cessation des livraisons à Kiev, celles-ci « devant être l’exception et non la norme ». Cela explique probablement la politique diplomatique macronienne en Asie centrale, comme relais d’influence des actions étatsuniennes dans la zone, en tentant d’exploiter ce qui reste du rayonnement international de la France. Visiblement décrédibilisé aux yeux de son homologue russe, le président français n’a plus guère d’atouts pour exister, empêtré dans la débâcle africaine, victime (et auteur) de la destruction de la politique arabe de la France, à la tête d’un pays en voie de paupérisation et objet de crises sociales, ethnoreligieuses, migratoires et politiques majeures et répétées[25]. Dans ce contexte, on voit mal Paris intervenir de manière décisive ou significative dans le conflit ukrainien. En revanche, Paris tente de proposer une « troisième voie » aux pays d’Asie centrale, hors des influences russes et chinoises. Berlin procède de même ; il semble toutefois que la Turquie soit mieux placée dans cette course. De plus, la stratégie US n’est pas de pacifier et réguler la zone, mais au contraire d’y relancer les troubles dans le cadre de sa stratégie de tension en instrumentalisant (encore une fois) l’islamisme. La France apparait vulnérable à cet égard et risque de souffrir du comportement de ses « alliés » en matière économique.[26]
  • Le Royaume Uni, malgré le départ de B. Johnson, reste un ennemi constant et acharné de la Russie. Les services britanniques soutiennent les actions terroristes de Kiev, tels que les assassinats ciblés (Cf tentative contre Oleg Tsarev, cible « légitime » selon Kiev ; l’intoxication dont a souffert Ramzan Kadyrov restant inexpliquée officiellement) ou de masse[27], envois de drones au-delà des lignes[28], la subversion sur le territoire de la Fédération de Russie[29], ou dans les Etats environnants (rappelons que les SAS[30] avaient été déployés en Afghanistan pour former les Moudjahidines, puis en Tchétchénie, et même auprès des Bosniaques et de l’UCK).Toutefois, une source militaire anonyme déclarait au Telegraph que la Grande Bretagne est à court d’armes pour approvisionner l’Ukraine le 4 octobre 2023.

L’Europe du Sud a adopté une position plus prudente qu’elle devrait conserver alors que la position de Kiev semble se détériorer.

  • La Hongrie est désormais rejointe par la Slovaquie[31] parmi les Etats de l’UE hostiles à l’engagement pour Kiev et contre la Russie, mais les efforts conjugués de Bruxelles et de Washington se portent sur les Balkans.

Le front Sud

  • La Turquie est toujours gardienne du « flanc Sud de l’OTAN ». Ankara a mené avec succès un exercice d’équilibriste afin de conserver voire accroître un leadership régional, sans créer de rupture totale avec les autres acteurs majeurs. Le président Erdogan a été réélu, malgré la gestion du tremblement de terre qui a frappé la Turquie, l’échec de la reconduction de l’accord sur les céréales, et le maintien de la menace Gülen, réfugié aux USA[32] qui demeure une carte et un moyen de pression de ces derniers. Sans se brouiller définitivement avec Moscou, Erdogan a réussi à pousser l’Azerbaïdjan face à l’Arménie, dans sa reconquête (en réalité conforme au droit international) du haut Karabakh en 2023, après la défaite de Erevan en 2020. De plus, l’influence turque en Afrique est méconnue mais réelle. Outre son appui aux Misratis libyens[33], l’Afrique noire est un enjeu économique et religieux important pour Ankara. L’expulsion de la France du continent (sauf le Tchad mais pour combien de temps encore ?), la réorganisation de la ChVK Wagner[34], le rôle diplomatique confié au général Surovikine, sont des données à prendre en compte par le régime turc, sachant notamment que les réseaux Gülen jouaient un rôle prépondérant dans l’influence turque subsaharienne. Evidemment, le nouvel embrasement au Proche Orient rebat les cartes entre Iran, Arabie saoudite, Egypte et Frères musulmans de Turquie[35] et du Qatar, sponsors du Hamas. On notera que la Russie est intervenue dans deux des trois pays cibles des Frères (Syrie, Libye, et Tunisie) depuis leur répression de 2013 en Egypte. Outre son chantage au flux migratoire avec l’UE, la Turquie bénéficie de l’implantation des Frères en Europe ; en outre, sa position-clef dans la mer Noire a permis à Ankara de monnayer son aval à l’entrée de la Finlande et de la Suède dans l’OTAN, ainsi que de s’imposer à Kiev comme à Moscou ; tous ces succès à court-terme ne doivent pas masquer que son panturquisme et sa radicalité religieuse (en rivalité avec les Wahabites et les factions islamiques dynastiques, opposées à la philosophie politique des Frères) créent une course de collision à plus long terme, avec la Russie et la Chine en Asie centrale, et dans le Caucase[36]. Dans un futur proche la position ottomane ne devrait pas beaucoup varier, sauf récupération totale par la Russie du littoral Nord de la mer Noire jusqu’à Odessa, ce qui est possible voire plausible.
  • Le gouvernement de la Moldavie, petit Etat mais limitrophe de l’Ukraine, joue délibérément une carte anti-russe, tournée vers une adhésion dans l’UE, malgré une opinion publique incertaine à cet égard, et une économie liée à la Russie. On évoque la construction d’un site de maintien en condition des matériels de guerre occidentaux fournis à l’Ukraine (principalement allemands, un site comparable en Pologne assurant le suivi des engins US), ainsi qu’un déploiement militaire de l’OTAN[37]. Ce dernier point, en face de la Transnistrie créerait un autre facteur de tension régionale majeure.
  • Bulgarie et Roumanie font leur possible pour rester à l’écart du conflit, notamment en mer Noire. Toutefois, le ministre de la Défense bulgare a annoncé fin septembre 2023 vouloir autoriser l’implantation d’une base otanienne en Bulgarie pour 55 millions d’USD payés par l’OTAN (qui doublerait la base US de Camp Bondsteel, au Kosovo) et l’Union européenne a annoncé que trente milliards d’Euros seraient consacrés à l’adhésion ou au renforcement des liens avec des Etats des Balkans. Malgré une opinion publique qui reste attachée à la fraternité slave, notamment à Sofia (surnommée « seizième république d’URSS » à l’époque), les subsides européens et une forme de démocratie très « balkanique » laissent supposer que le verrouillage au Sud passera par cette région. L’attraction de l’UE pourrait également concerner la Serbie, qui subit une forte pression téléguidée par Washington par Kosovars interposés et malgré la volonté d’une majorité de la population qui n’a pas oubliée les crimes de l’OTAN[38] en 1999. Les déclarations relativement contradictoires du président Vucic, qui se sont clarifiées et durcies fin septembre 2023[39], témoignent de cette inconfortable situation.

Le front Sud-Est

Les anciennes républiques soviétiques d’Asie centrale (et périphériques) font l’objet de tentatives d’immixtion multiples. Les USA tentent de s’y implanter, tant pour compenser leur retrait d’Afghanistan que pour déstabiliser la région et y relancer des foyers de crise sur fond d’hostilité à la Russie, voire à la Chine[40]. Cette démarche est relayée par des Etats vassaux. En 1996 et 1999, le soutien aux indépendantistes tchétchènes, pour déstabiliser la récente CEI créée par Moscou et perturber les projets d’acheminement d’hydrocarbures, avaient mobilisés les monarchies du Golfe et les services britanniques, assistés de mercenaires baltes (déjà). Actuellement, les Etatsuniens et les Britanniques tentent de raviver les braises du jihad et de réactiver les dissensions pour fragiliser l’Etat fédéral et multi-ethnique russe[41]. Il s’agit dans un premier temps d’éloigner de Moscou diplomatiquement, politiquement et économiquement les Etats de la ceinture de « l’étranger proche ». Puis, dans un second temps de tenter de faire éclore au sein de la Fédération même des irrédentismes ou des crypto-nationalismes centrifuges.

  • En Géorgie, le service de sécurité de l’Etat annonce un risque de tentative de coup d’Etat, après l’obtention du statut de candidat à l’entrée dans l’UE, par des proches de l’ancien président Saakachvili et le chef de la Légion géorgienne en Ukraine.
  • L’Arménie avait été l’objet d’une visite officielle de Nancy Pelosi, présidente de la Chambre des représentants des USA, en 2022. Depuis, le premier ministre Pashinyan, qui est fortement contesté pour sa gestion du conflit avec l’Azerbaïdjan, tente de se rapprocher de Washington, de l’UE (déclaration du 21 octobre) et de Paris (du fait de l’importante diaspora arménienne en France[42]) ; ces démarches s’accompagnent d’un discours antirusse[43], demandant le départ des forces d’interposition russes[44] et critiquant Moscou pour la perte de la province du haut Karabakh (tout en concédant que cette province, obtenue par la force, appartenait de jure à l’Azerbaïdjan). « En même temps », le gouvernement arménien rendait publique une proposition juridique pour permettre la venue du président Poutine sans appliquer le mandat de la CPI ratifié le 14 octobre par le président Khatchatourian. Il apparaît que le régime d’Erevan, déjà contesté à l’intérieur, tente de jouer une politique de bascule pour se maintenir. La perte du Karabakh a désarmé les milices locales qui menaçaient son pouvoir, mais le déplacement de 70 000 habitants, chassés par les exactions azéries va créer un élément de déséquilibre. Les choix de Moscou seront complexes également, mais une opposition militaire semble hautement improbable de la part d’une Arménie déjà sous la menace azérie. La situation a justifié la création d’une plate-forme consultative régionale sur le format 3+3 (Azerbaïdjan, Arménie, Géorgie plus Russie, Iran et Turquie).
  • En Azerbaïdjan, auréolé de sa victoire au Karabakh qu’il doit largement à l’assistance turque[45] (et peut-être à la neutralité russe), le régime de Bakou est sous la coupe d’Ankara, mais n’adopte pas une attitude hostile à la Russie. Il est possible que Bakou attaque de nouveau l’Arménie, qui refuse d’ouvrir un couloir pour relier l’Azerbaïdjan a son enclave. Des accords d’exploitation gazière et pétrolière vont être conclus entre Bakou et Moscou. Il est probable que les tractations entre Vladimir Vladimirovitch Poutine et Reccep Tayip Erdogan ne sont pas circonscrites à la mer Noire et à l’Ukraine, mais englobent l’Afrique et l’Asie centrale, sur la base d’une politique réaliste et non de jeux d’égo puérils. Les liens tissés entre Moscou et Téhéran joueront aussi un rôle localement, encore que, autant pour Ankara que l’Iran, la situation au proche Orient risque de focaliser les attentions.
  • Au Kazakhstan, le régime Tokaiev est courtisé par les USA, l’Allemagne[46] et la France, avec le voyage du président Macron à Astana le 1er novembre (suivie de celle d’Erdogan[47], puis de celle de Orban)[48]. Premier producteur mondial d’uranium[49], également riche en terres rares, ce vaste pays tente de s’éloigner de la Russie et bénéficie de l’intérêt de la Chine (qui s’est posée en garant de ses frontières). Cependant la Russie reste toujours le partenaire économique principal et un voisin qui ne peut être négligé. C’est toutefois un équilibre bien difficile à maintenir ; ainsi, après avoir déclaré son soutien au régime de sanctions antirusses lors de sa visite en Allemagne et avoir mis fin à la fourniture de 106 produits, le président Tokaiev a demandé le soutien russe pour résoudre une pénurie de carburant. Autre signe de bonne volonté, le contrat de location du site de Baïkonour, conclu jusqu’en 2050, n’a pas été augmenté. On peut penser qu’une évolution radicale demeure improbable, d’autant que comme plusieurs de ses voisins, le pays, à 70% musulman mais laïc, doit faire face à une menace islamiste. Enfin, les relations avec les citoyens du pays immigrés en Russie sont généralement bonnes, à la différence d’autres nationalités voisines. De plus, en janvier 2022 un fort mouvement social a dégénéré et rendu nécessaire l’intervention de l’OTSC, donc de l’armée russe, qui a sauvé le régime. La population locale est très favorable à VV Poutine, et elle est plutôt sinophobe. Le président Poutine devrait être reçu à Astana le 9 novembre.
  • Le Tadjikistan est membre de l’organisation de coopération de Shangaï ainsi que du traité de sécurité collective (OTSC) et dépend très fortement de la Russie, qui accueille de très nombreux immigrés Tadjiks (33% des travailleurs sont émigrés, dont 90% en Russie). La population est affiliée à la Perse et le pays a subi le voisinage de l’Afghanistan où les Tadjiks s’opposent aux Pachtouns ; outre le voisinage russe, la Chine est limitrophe et l’Iran a noué de bonnes relations avec le Tadjikistan qui l’a parrainé pour entrer dans l’Organisation de Shangaï. Le pays avait concédé des bases à l’OTAN (la France avait une base à Douchanbé) pendant la guerre en Afghanistan. Actuellement, la Russie maintient la base militaire 201 sur place. Les relations sont complexes, forte rémanence du passé russe et soviétique mais politique de dérussification en 2007 ; Douchanbé applique l’accord sur la TPI. Le régime craint fortement l’islamisme radical. Il est donc peu probable que les relations se détériorent brutalement avec Moscou, mais il existe des germes de dissensions, que la politique anglosaxonne de gestion par le chaos tente de raviver. Par ailleurs, l’enclave tadjike de Vorough est l’objet d’affrontements avec le Kirghizstan qui a dû évacuer 60 000 personnes. Les tensions semblent se réveiller dans la zone, ce qui conduirait probablement à une intervention de stabilisation de puissances étrangères, dont la Fédération de Russie (mais une action collective de l’OTSC serait évidemment plus diplomatique). Enfin, début 2022, après le lancement du SVO[50] et le retrait de Kaboul, le Pentagone a saisi les autorités tadjike et Ouzbeke pour implanter des bases dans ces deux pays. Si la Russie apparaissait comme la pourvoyeuse de sécurité et la Chine de développement économique, on observe que Pékin développe davantage ses relations que Moscou, y compris au plan militaire[51]. Moscou et Pékin sont cependant d’accord pour tenter de repousser l’influence occidentale dans la région.
  • Au Kirghizstan, la frontière est fermée avec le Tadjikistan et des tensions ont conduit à l’expulsion de 300 000 Ouzbeks il y a dix ans. Les USA maintenaient une base à Manas près de Bichkek pendant les opérations en Afghanistan. Actuellement la Russie dispose de la base de Kant. La coopération de Bichkek avec Moscou est bonne, comme en témoigne la visite du président russe en octobre dernier, avant son voyage en Chine.
  • L’Ouzbékistan et le Turkménistan, depuis l’effondrement de l’URSS, sont considérées comme les républiques d’Asie centrale les plus rétifs à l’influence russe. L’Ouzbékistan est un membre fondateur de l’Organisation de Shangaï et membre de l’OTSC. Tachkent reste la capitale d’un pays très tourné vers l’agriculture et le coton et fortement dépendant de l’émigration de ses citoyens en Russie, bien que situé sur les routes de la soie et objet de l’intérêt des Occidentaux (Cf. voyage du président Macron). En Russie, les communautés Ouzbèkes, largement présentes dans les centres de MMA, sont considérés par beaucoup comme criminogènes et importatrices d’un Islam radical ; l’Ouzbékistan est pourtant un Etat laïc, bien que musulman à 94%[52]. Le pays a officialisé son soutien à l’Ukraine, le refus d’engager des troupes dans le conflit en cours et de reconnaitre les Républiques de Donetsk et de Lougansk en 2022. Depuis, la ligne officielle est celle de la neutralité et seuls les progressistes semblent soutenir l’Ukraine. Le président Chavkan Mizroiev, réélu en juillet 2023 (avec 87% des suffrages) passe pour un réformateur. Il a mis fin à l’éloignement d’avec Moscou décidé par son prédécesseur et adopte une ligne d’équilibre avec la Russie. Il a également développé les relations avec la Chine[53] et souhaite ouvrir son pays à la coopération avec l’étranger. Si des évolutions surviennent entre Moscou et Tachkent, elles devraient a priori plutôt concerner les relations migratoires et le traitement des communautés ouzbèkes en Russie.
  • Le Turkménistan a déclaré sa neutralité à l’ONU en 1995 et n’a adhéré à aucune des organisations régionales (Traité de Shangaï, OTSC, CEI à l’époque…) ; c’est néanmoins un Etat stratégique pour Moscou[54], qui dessert l’Iran et possède un réseau de pipelines et gazoducs utiles aux relations énergétiques vers la Chine. Le nouveau président Turkmène (succédant à son père) Serdar Berdymoukhammedov a reçu le président Poutine et souligné le partenariat stratégique et les liens d’amitiés entre les deux pays, quatre mois après le début de la SVO en Ukraine. Il a été invité à la dernière édition du Forum économique international de Saint-Pétersbourg. Achgabat a néanmoins noué un partenariat avec l’OTAN dès 1992, devenant membre du partenariat pour la paix en 1994 puis adhérant en 1997 au Conseil de partenariat euro-atlantique. Il n’y a pas eu de mise à disposition de troupes du fait de la politique de neutralité du pays, ni d’activités communes depuis 2015. Malgré un intérêt pour l’UE au-delà de la caspienne, il parait improbable que le pays change de politique vis-à-vis de Moscou à brève échéance.

Les liens historiques et culturels, les dépendances énergétiques, économiques et la faiblesse sécuritaire dans une zone soumise à la menace de l’Islamisme radical et aux oppositions ethniques, interdisent aux pays d’Asie centrale Kazakhstan, Kirghizistan, Ouzbékistan, Tadjikistan et Turkménistan de s’opposer trop frontalement à la Russie. Il existe cependant un sentiment postcolonial et une volonté de s’affranchir de la tutelle russe en obtenant de nouveaux partenariats ; Chine, Iran, Turquie et même Inde sont prêts à donner suite à cette demande. Les Occidentaux, Allemands et Français en premier rideau, USA en second, tentent également de développer les relations en ce sens. On peut toutefois avancer qu’aucune bascule immédiate ne paraît envisageable, malgré l’impact économique des sanctions occidentales et un certain désaveu de la SVO en Ukraine, par les gouvernements sinon les populations. Toutefois, sur une base préexistante de dérive radicale tentant d’importer une forme d’Islam non traditionnel dans la région, des opérations de déstabilisation par les services anglo-saxons pourraient altérer fortement la situation. Le FSB a retenu fin octobre l’Ouzbekistan, le Tadjikistan, le Kazakhstan et le Kirghizstan comme cibles probables des tentatives d’instituer le « Califat mondial ».

Le front intérieur

Comme il est de règle lors des conflits, ouverts ou larvés, les services Ukrainiens et Anglo-saxons (et peut-être Français) mènent des opérations de déstabilisation de la Fédération de Russie (v. supra). Evoquant « les élites US bénéficiaires de l’instabilité mondiale », le président Poutine a évoqué « l’araignée dans sa toile » qui tente d’activer des réseaux externes comme internes. Les événements du 29 octobre 2023 sur l’aéroport de Makhatchkala dans la République du Daghestan, lorsqu’une foule a tenté de prendre à partie des voyageurs d’un avion de Red Wing arrivant de tel Aviv, ont été perçus comme une tentative de Maïdan au Daghestan. Cet Etat de la Fédération (qui en comporte 22), qui a souffert du conflit en Tchétchénie et de l’islamisme radical armé entre les années 1996 et 2015, est largement musulman (83% de la population) mais ethniquement hétéroclite ; considéré comme une partie du « Califat caucasien » par les tenants de ce dernier, il a été la source principale de Jihadistes internationaux venus de Russie et connait un accroissement de l’influence salafiste. Des appels sur les réseaux sociaux et la chaine Outro Daghestan[55] ont incités à agresser les passagers Israélites.[56] Les autorités ont réagi par l’envoi d’importantes forces de sécurité et 282 personnes sur 850 participants ont été interpelés sans effusion de sang. Le chef de l’Etat daghestanais Melikov a stigmatisé les auteurs de ces violences contre des citoyens juifs et tout l’appareil d’état russe s’est mis en branle pour dénoncer, réprimer et prévenir, ce type d’agression[57]. Le président Poutine, à l’occasion de son discours pour la fête de l’unité le 3 novembre, a qualifié les tentatives occidentales d’organiser des pogroms de Juifs en Russie « d’incroyablement dégoutantes ». Le Mufti du Daghestan a également condamné publiquement cette tentative de violences collectives et a licencié deux chefs de département trop zélés dans leur soutien au Hamas ; mais il est notable que certains imams locaux et des célébrités du cru (notamment champions de MMA) ont appelé à la clémence pour les auteurs. Le chef de la Tchétchénie a également dénoncé[58] ces violations inacceptables de la loi en Russie, vraisemblablement selon les instructions de Moscou ; dans son style inimitable il a suggéré « de tirer trois coups de feu de sommation en l’air et le quatrième dans le front » des contrevenants.

Tenter d’exploiter des tensions ethniques, religieuses et sociales chez son ennemi est évidemment un grand classique de la subversion. La réaction de certains Daghestanais et les expulsions massives et régulières de migrants de Russie[59], la mise en cause de ceux-ci dans le crime par de nombreux canaux de réseaux sociaux, mais aussi par le ministre de l’Intérieur russe Kolokoltsev[60], leur surreprésentation dans les événements violents, souvent en lien avec les clubs ethniques de sport de combat[61], auraient pu laisser penser que cette stratégie avait des chances d’obtenir les mêmes résultats qu’en Europe occidentale. Cependant, il semble que les autorités russes ont, elles, la capacité d’expulser en masse et de négocier avec les pays de départ en position de force, de réprimer fortement les crimes et délits liés à la drogue[62], et que la mystique patriotique trouve encore un écho dans le Républiques (ainsi, 25 000 Daghestanais ont servi ou servent lors de l’opération spéciale et les ressortissants des Républiques périphériques sont sur-représentés au regard de leurs populations dans les forces engagées en Ukraine). On ne peut donc qu’espérer que la fermeté mesurée dont a fait preuve le pouvoir russe permettra d’éviter une relance du terrorisme islamiste qui créerait un second front.


[1] Après deux « tournées » présidentielles qui se sont révélées de graves échecs, et une initiative de coalition contre le HAMAS lancée à Jérusalem qui n’a pas recueilli de franche adhésion

[2] Vision qui sous-tend la doctrine Wolfovitz, les orientations diplomatico-militaires définies par Z. Brzezinski, les analyses historico-politiques d’E. Luttwak. Les réflexions d’un Huntington, ou actuellement d’un Mearshimer ou d’un R. Kagan en restent imprégnées peu ou prou.

[3] Même si l’opération spéciale a désormais acquis un niveau de guerre industrielle dont les effets de masse sont hors de portée des pays de l’OTAN sauf les USA, elle présente de nombreux points communs avec la guerre d’Espagne de 1936-1939 en termes d’essais techniques, d’innovation tactique, et de préparation à un conflit plus étendu.

[4] Longtemps attendus et finalement apparus pour briser l’offensive de Kiev

[5] Permettant probablement d’évaluer les besoins pour le futur Su 57

[6] A priori pas encore employé

[7] Dont l’apparition a correspondu à un véritable massacre de l’aviation de Kiev

[8] Le budget de la défense russe va doubler en 2024 atteignant 6% du PIB, les effectifs vont augmenter de 380 000 hommes sous contrat, de nouveaux armements et des matériels modernisés sont mis en service pour être « battle proven ».

[9] Les forces nucléaires bénéficient également des modernisations, les vieux Tu 95 volant régulièrement et portant des missiles de croisière modernes, le nouvel ICBM Sarmat étant entré en service et les SNLE emportant des torpilles autonomes (ex Poseidon), des missiles à changement de milieu modernisés (ex Bulava) ou de la mine sous-marine autoportée SDMD.

[10] L’objectif stratégique d’hégémonie mondiale, quasiment atteint après la chute de l’URSS, à travers la puissance aérienne et la maitrise maritime, semble actuellement en voie d’érosion. Les capacités requises en termes de technologie et de financement paraissent excéder les possibilités étasuniennes actuelles.

[11] Les médias US se font l’écho d’une éventuelle solution « à la coréenne » (qui serait d’ailleurs tout aussi bien « à l’allemande » de 1954 à 1989), qui paraît douteuse au regard des buts définis par la Russie.

[12] Cette stratégie indirecte est logique de la part d’une thalassocratie et reprend la pensée stratégique appuyée sur la Royal Navy du Royaume- Uni, contre la France en général et Napoléon 1er en particulier.

[13] Le sultan Erdogan a demandé au parlement turc de valider son aval au profit de la Suède le 23 octobre 2023.

[14] Armement léger, munitions, missillerie, blindés et même avions.

[15] 30 000 actifs et 25 000 réservistes mais un vivier potentiel de 4 millions d’hommes et femmes pour la Suède, 34 000 actifs dont 12 000 professionnels, mais un vivier de 2 200 000 hommes et femmes pour la Finlande.

[16] Retour à la conscription en Suède, accord avec l’USMC et l’US Air Force à Vaernes en Norvège, création d’une base américaine en Finlande annoncée en mai 2023.

[17] Dans le travail d’analyse, il est parfois difficile de résister à la tentation de la politique fiction, mais cette option ne paraît pas totalement détonante et a trouvé des échos en Russie comme de l’autre côté du Boug.

[18] Les Britanniques, notamment post Brexit, conservant leur « relation particulière »

[19] La pression de Bruxelles, puis celle de Washington neutralisent les évolutions politiques auxquelles des élections pourraient faire croire, comme l’illustrent les cas de l’Italie, dans une moindre mesure de la Slovaquie et, hors UE, de la Serbie et de l’Arménie.

[20] Ce qui n’était pas le cas en URSS, dont la doctrine envisageait un emploi plus « libéral » des armements de théâtre. La conception actuelle est tout à fait comparable à celle de la Dissuasion française, ce que les contempteurs du président russe oublient lorsqu’ils évoquent ses déclarations, d’ailleurs mesurées, sur le sujet

[21] Certaines sources font état des liens de l’actuel chancelier issu de la SPD avec la CIA. Curieusement O. Scholtz ne figure pas dans la Atlantik Brücke, qui compte dans ses rangs les quatre derniers chanceliers, H. Kissinger, l’actuel président et CEO de Airbus Industries (ce qui explique bien des choses), un ancien président du parlement européen, etc…

[22] Et avec laquelle seulement un armistice a été signé, ce qui permet une occupation de facto.

[23] Le chef d’état-major et plusieurs généraux allemands ont affirmé que la Bundeswehr était exsangue.

[24] L’armée française parviendra en 2030 aux objectifs définis, qui répondent aux besoins de… 2010. Avec des parcs majoritairement en dessous de 24 tonnes, la primauté de la Roue sur la chenille, l’achat de matériels de précision mais l’absence totale de la masse, cette armée est tournée vers l’expéditionnaire. Disposant de toutes les capacités mais en mode échantillonnaire, elle rappelle l’état de l’armée impériale de 1870, dirigée par des cadres formés aux tactiques de l’ère napoléonienne ou aux guérillas coloniales et affrontant une armée prussienne moderne. La France a longtemps dû mettre sur pied deux armées conjointes, une armée de ligne pour l’Europe et une armée légère pour les colonies ; Actuellement les engagements ont façonné une armée légère, efficace dans ce contexte, mais inadaptée à la haute intensité et à la guerre industrielle. Le sort des AMX 10 RC en Ukraine en est un exemple anecdotique mais parlant.

[25] Les diasporas en France transférant sur place leurs oppositions, comme le démontrent les réactions à l’embrasement du proche Orient en France-même.

[26] La France est le 5éme partenaire économique du Kazakhstan- notamment grâce à TOTAL-, d’où elle importe 40% de son uranium et l’Agence Française du développement ambitionne d’approfondir les échanges.

[27] 22 civils prorusses auraient été assassinés par des militants de Pravy Sektor dans la région de Kherson le 8 octobre

[28] Selon des fuites récentes, le semi-échec de l’attaque contre le pont de Crimée aurait fait l’objet d’un monitoring par le MI6, avec un dossier commun des responsables britanniques Donnelly et Ward.

[29] Certaines sources font même état de plan d’attaques de sites nucléaires civils russes sous l’égide du MI 6. De fait, la centrale nucléaire de Koursk a été l’objet d’une attaque de drones, celle de Novovoronej étant ciblée selon le directeur du FSB, le 21 octobre, et celle de Zaparodjè étant la cible fréquente de tirs d’artillerie et de drones.

[30] Special Air Service, commandos de forces spéciales prêtés par le MoD au MI6 pour les interventions extérieures

[31] Le nouveau premier ministre Fico, hostile à l’immixtion dans la guerre entre Kiev et Moscou est soutenu par Lubos Blaha, désormais speaker au parlement slovaque, très antiotanien et russophile. Ils ont été portés par les élections législatives qui ont démontré un rejet de la politique d’engagement de la Slovaquie aux côtés de Kiev depuis 2022.

[32] Le nouveau ministre de la Défense de Kiev est un Tatar appartenant à la mouvance Güleniste qui avait été accusée de la tentative de putsch de 2016.

[33] Le sort du général Haftar, soutenu par Wagner avec peu de succès dépendra sans doute d’un accord russo-turc

[34] On annonçait en septembre la vente des actifs de la compagnie par la famille Prigojine, début novembre 2023, la désignation du fils Prigojine, Pavel, à la tête de la société ; mais le chef du comité de défense de la Douma Kartapolov annonce que la ChVK Wagner a définitivement cessé d’exister, ses anciens membres étant pour la plupart engagés dans la Garde russe ou sous contrat avec l’armée fédérale. La situation en Biélorussie reste peu claire. Dans la région de Moscou, des publicités incitent à s’engager dans un « corps d’élite » non identifié, candidatures acceptées jusqu’au 25 novembre, pour 1 million de Roubles et selon des modalités qui rappellent les termes des engagements chez Wagner, et une mention de voyage à partir de Moscou dans le Monde entier. Enfin, on note que le 29 septembre 2023 le président Poutine a reçu A. Troshev ancien chef d’état-major de Wagner avec le vice-ministre de la défense Yekurov.

[35] Inscrit sur la liste fédérale des organisations terroristes et extrémistes par la Fédération de Russie

[36] Voire avec l’Europe, à Chypre, face à la Grèce et là où les diasporas turques sont importantes, comme en Allemagne et, au prorata de la population, aux Pays Bas, en Belgique, au Royaume Uni et en France.

[37] Chisinau, après les refus polonais et roumain, accepterait d’accueillir les F16 livrés à l’Ukraine sur son aéroport de Merculesti si l’UE verse 310 millions d’Euros pour sa remise en condition, ce qui exposerait son territoire (non OTAN) à des frappes russes.

[38] Bombardements de sites civils, encouragés et vantés par le secrétaire d’Etat de l’administration Clinton… un certain Joe Biden.

[39] Le chef du comité européen pour l’élargissement de l’OTAN G. Fehlinger a carrément appelé à bombarder Belgrade le 24 septembre 2023

[40] En perturbant les « routes de la soie » et en ravivant des oppositions ethno-religieuses susceptibles de trouver écho en RPC même.

[41] Il existe plusieurs projets de démembrement de la Russie en micro Etats au sein des cercles de pensée NEOCON nordaméricains, qui trouvent une oreille favorable en Europe (Pologne, Etats Baltes…). C’est la logique impérialiste qui a présidé à la destruction de la Yougoslavie dans les années 1990. C’est également la pensée rooseveltienne qui prévoyait le démembrement de la France ; l’échec du projet d’AMGOT et la posture gaulliste ont empêché ce projet d’aboutir, mais la destruction de l’empire colonial a néanmoins été obtenue par le soutien US aux opposants. Le président Vladimir Vladimirovitch a systématiquement insisté dans ses discours sur la nécessité impérative de préserver la cohabitation de peuples et d’ethnies diverses au sein de la Fédération russe, chose que les « antiracistes » occidentaux ne soulignent jamais.

[42] On notera que le président Français avait annoncé 45 millions d’Euros pour les réfugies d’Artsakh mais que sept ont été versés début octobre. Deux invitations de venir à Erevan ont été refusées, le ministre des Affaires étrangères remplaçant le président.

[43] Le 26 octobre 2023 le premier ministre Pashinyan déclarait que le Kremlin voulait lui retirer le pouvoir et qu’il fallait prendre des mesures de protection et antirusse et anti-opposition animée par l’ancien premier ministre Manukyan. D’après Moscou 270 agents féminins et masculins du GUR et du SBU ukrainiens ont été envoyés à Erevan pour initier des manifestations antirusses comme l’attaque de l’ambassade à Erevan

[44] Et leur replacement par des Français et des Américains, ces derniers exigeant que leurs troupes se voient garanti de ne subir aucun danger (sic). Déclaration du ministre des AE Mirzoyan au conseil de sécurité de l’ONU le 22 septembre 2023.

[45] Fourniture de moyens, notamment les fameux drones Bayrakatars, mais aussi appui au commandement, en doctrine et en état-major, et sur le terrain avec des commandos turcs. Cela reflète assez bien les modalités du soutien russe à Damas, Ankara ayant connu quelques déboires en Syrie (où avaient brulé les premiers Leopard 2 placés en situation opérationnelle).

[46] Un sommet Allemagne-Asie centrale a réuni les présidents du Kazakhstan, du Kirghizstan, du Tadjikistan et du Turkménistan début octobre 2023

[47] depuis 2021, l’Organisation des États turciques (OET) regroupe tous les États turcophones de l’Asie centrale : le Kazakhstan, le Kirghizstan, l’Ouzbékistan (membres) et le Turkménistan (observateur)

[48] Un partenariat a été signé avec l‘UE en novembre 2022.

[49] Approvisionneur principal des 56 réacteurs nucléaires français à 27%, devançant l’Ouzbekistan, la Namibie et l’Australie, le Niger devenant une source douteuse. 8000 tonnes d’uranium sont nécessaires chaque année.

[50] Spetsialnaïa Voennaïa Operatsia, traduit par « opération militaire spéciale » en français.

[51] La Chine surveille l’islamisme radical et le risque de contagion des Ouigours, en même temps qu’elle sécurise les axes stratégiques de cette zone de rencontre de différents impérialismes, russe, chinois, persan, turc et qu’elle s’oppose à un renforcement de la présence occidentale.

[52] Mais qui interdit le port du Niqab et la propagande en faveur de la polygamie

[53] Vladimir Poutine et Xi Ji Ping ont chaleureusement félicité le président Ouzbek lors de sa réélection.

[54] Le président Poutine a effectué deux voyages au Tadjikistan et au Turkménistan à l’été 2022

[55] Chaine dirigée par Abakar Abakarov, Daghestanais ayant vécu à Odessa en 2016 et travaillé avec le SBU ukrainien, et installé en Turquie, d’après des sources russes

[56] Avec une rare (?) mauvaise foi, les médias français ont ravivés le souvenir des pogroms historiques en Russie (oubliant la Pologne) sans évoquer le mot « islam »

[57] A partir du 5 novembre un régime renforcé de maintien de l’ordre est mis en place par le ministère de l’Intérieur de la république du Daghestan.

[58] En condamnant en même temps les agissements d’Israël à Gaza

[59] Le patriarche Kyrill en rappelant les bons rapports avec les musulmans Russes a néanmoins souligné les risques liés à l’immigration islamique de masse pour la civilisation russe

[60] Il signale que les crimes et délits commis par des migrants ont augmenté de 32% entre 2022 et 2023, dont le quart lié à des affaires de stupéfiants

[61] Le Conseil des droits de l’Homme de la Fédération de Russie a appelé à la fermeture des clubs clandestins de MMA qui sont « un terrain fertile pour le radicalisme ».

[62] Qui valent des années en colonies pénitentiaires PUIS une expulsion à leurs auteurs étrangers

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Olivier CHAMBRIN

7 thoughts on “Tour d’horizon de la situation géostratégique eurasienne

  • Ping :

  • “… suppression des droits civiques, suppression des prestations sociales et médicales qui touchent une population majoritairement âgée, interdictions culturelles, confiscations…). La situation n’est pas sans évoquer celle des Pieds-noirs français lors de l’indépendance de l’Algérie”
    Dans quel document historique, relatif à la guerre ou à l’indépendance de l’Algérie, avez-vous trouvé cette information.

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    • Le FLN a refusé les droits de nationalités aux pieds noirs. De même, les harkis sont toujours considérés comme une sorte de sous-citoyen avec certaines fonctions interdites.

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      • Bonjour Monsieur,
        Je vous remercie de votre intervention pour répondre à un autre lecteur intéressé par ces précisions historiques.
        L’application des Accords d’Evian est restée unilatéralement favorable à la République d’Algérie. C’est un sujet qui attise inutilement les polémiques, mais dont il est bon de rappeler les réalités, comme vous l’avez fait. Toutefois, je ne souhaite ici que m’intéresser à la situation de la Russie, de l’opération spéciale.

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    • Remarque valable également vis-à-vis des juifs algériens, des berbères (cf. la fermeture de la chaire kabyle à l’université d’Alger) et des marocains (cf. nettoyage ethnique avec expulsion des marocains habitant l’ouest algérien dans les années 1970) …
      Voir à ce sujet les livres de l’éminent africaniste Bernard Lugan (originaire de Meknes au Maroc d’ailleurs) qui intervient souvent sur Stratpol.

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    • Les harkis sont jusqu’à maintenant considérés comme des sous-hommes n’ayant pas accès à certains fonctions. Et les pieds noirs n’ont pas eu la nationalité à l’indépendance d’ou leurs statuts inférieurs.

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    • Bonjour Monsieur,
      1-Les éléments que vous demandez ont été présentés par un autre commentateur, que je remercie.
      2-Ma comparaison porte sur l’existence de colonies de Russes, laissés après la chute de l’Union soviétique dans des pays devenus indépendants et désormais hostiles à la fédération de Russie, qui les considèrent en sous-citoyens. Compte -tenu de la nature de la colonisation française, après la dissolution de l’Empire puis de l’Union française, seuls les ex-départements français d’Algérie ont connu ce problème à cette échelle. C’est aussi le cas des Arméniens du haut Karabakh, que j’aurais pu évoquer dans le cadre d’un même schéma et qui ont fui la région pour aller en Arménie. C’est aussi le cas des Serbes du Kosovo qui ont du quitter la province. Comme les Français rapatriés, ce sont des populations expulsées par les nouvelles autorités et pas toujours bien accueillies dans leur métropole d’origine. On pourrait aussi rappeler le cas de nombreux citoyens ayant dû quitter le territoire de l’actuelle Ukraine depuis 2014, la Russie demeurant le premier état d’accueil.
      3-Je conclurai en précisant que je n’entrerai dans aucune polémique franco-française ou franco-algérienne sur la Guerre d’Algérie, pas plus que sur les événements actuels au proche Orient.

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